Article technique

Durée de vie et cycle de vie selon la future norme ISO 10993-1 (2025) : qui, quand, quoi et comment ?

12/06/2025

La sécurité biologique d’un dispositif médical (DM) doit être envisagée à chaque étape de son cycle de vie, comme le stipulent les Exigences Générales de Sécurité et de Performance de l’Annexe I du Règlement MDR 2017/745 et la clause 4.7 de la norme ISO 10993-1:2018. La prochaine évolution de cette norme, actuellement sous forme de projet final (ISO/FDIS 10993-1 :2025) en cours d’approbation avant publication, prévoit d’ailleurs de renforcer cette notion en développant une clause dédiée et en l’intégrant tout au long du document. Cet article propose ainsi une analyse claire et pratique des concepts de cycle de vie et de durée de vie d’un DM afin de mieux comprendre et anticiper les enjeux à venir dans le cadre de l’évaluation biologique selon la future norme ISO 10993-1:2025.  

1. Termes clés et définitions

La compréhension approfondie des concepts de durée de vie et de cycle de vie devient fondamentale pour anticiper les défis de conformité et garantir la sécurité des patients.

  • Le cycle de vie couvre toutes les étapes de l’existence du dispositif : de la conception initiale (choix des matériaux) à la mise au rebut, ce qui inclut entre autres, la production, le stockage, le transport, ou l’utilisation clinique.
  • La durée de vie est une partie intégrante du cycle de vie et correspond à la période pendant laquelle le dispositif réalise sa fonction prévue (utilisation clinique), que ce soit un DM à usage unique, un instrument réutilisable soumis à des cycles répétés de nettoyage, désinfection et/ou stérilisation, ou encore un implant conçu pour rester fonctionnel pendant plusieurs années dans le corps humain. Les évaluations de la durée de vie se concentrent sur les risques biologiques liés aux contraintes cumulées, telles que la dégradation des matériaux, l’usure et la libération de substances. Ces évaluations prennent également en compte les spécificités propres à chaque type de dispositif, comme les effets systémiques liés à la dégradation dans le temps d’un implant dans le corps.

Une fois ces concepts fondamentaux établis, il est crucial de comprendre leur application concrète dans le contexte spécifique des différents types de DM.

2. Cycle de vie VS Durée de vie : Application concrète selon les différents types de DM

De leur utilisation unique à leur réutilisation prolongée, chaque catégorie de DM présente des enjeux spécifiques en matière de sécurité biologique, qu’il convient d’examiner avec attention.

2.1. Cas des DM à usage unique

Les DM jetables à usage unique ont généralement une durée de vie limitée à leur période d’utilisation, allant de quelques minutes à quelques heures. L’impact de cette dernière sur la sécurité biologique est souvent négligeable et l’estimation des risques porte généralement sur les paramètres critiques du cycle de vie, tels que la qualité des matières premières, les processus de fabrication ou les adjuvants utilisés. Toutefois, si l’utilisation implique par exemple des frottements qui peuvent générer des particules ou des relargables (comme l’actuation d’un robinet, d’une valve ou bien un revêtement siliconé d’une aiguille contre un tissu), alors le risque doit être évalué. La nouvelle norme insiste également sur la prise en compte de l’utilisation répétée ou cumulative pour déterminer la période d’exposition totale, ce qui peut entraîner une exposition prolongée à des constituants ou particules susceptibles d’interagir avec les tissus ou le système circulatoire, même lorsque les contacts individuels restent courts ou intermittents.

En mettant l’accent sur la prise en compte de l’ensemble du cycle de vie, la nouvelle norme ISO 10993-1 souligne également l’évaluation des effets du stockage et du transport sur les propriétés physico-chimiques, et donc sur la biocompatibilité d’un DM. En effet, cet aspect est souvent négligé par les fabricants, qui focalisent leur attention sur le maintien des performances des produits et du packaging après stockage et transport. En cas de risque non maîtrisé, la mise en place un programme d’essais suivant la norme ISO 10993-1 incluant des DM expirés et/ou ayant subi des conditions de transport représentatives pourra s’avérer nécessaire.

2.2. Cas des DM implantables

Dans le cas des dispositifs implantables, résorbables ou non, l’évaluation de la durée de vie doit prendre en compte la dégradation des matériaux lorsqu’ils sont dans le corps du patient. Les normes ISO 10993-9 et les parties -13, -14 ou -15 aident les fabricants à modéliser les réponses biologiques à long terme, telles que la corrosion, la libération de particules ou les effets systémiques des relargables susceptibles de migrer depuis le DM. Ces risques sont directement liés aux autres étapes du cycle de vie, puisque le grade des matériaux, les conditions de stockage et la régularité de la fabrication peuvent influer sur les profils de dégradation. Pour ces raisons, les fabricants doivent définir précisément la durée de vie de leurs DM.

2.3. Cas des DM réutilisables

La notion de durée de vie est d’une importance primordiale pour les DM réutilisables. En effet, les fabricants sont tenus de définir les conditions à respecter garantissant une utilisation sûre et répétée de leur DM. Le règlement MDR 2017/745 prévoit deux façons de définir la fin de vie d’un DM réutilisable : (1) fixer un nombre maximal de cycles de réutilisation, ou bien (2) identifier clairement les signes d’usure, tel que des points de corrosion ou l’altération d’un revêtement. Dès lors, les performances et/ou la sécurité biologique ne sont plus garantis et la fin de vie du DM est déclarée. La définition de la durée de vie et des critères de fin de vie par le fabricant est donc essentielle, car il ne s’agit pas seulement de démontrer que le dispositif est biocompatible avant sa première utilisation mais que l’ensemble des cycles de retraitement du DM n’entraîne pas de risque d’accumulation de souillures, de résidus de nettoyage ou d’altérations des matériaux. Ceci peut être évalué par la mise en place d’un programme d’essais physico-chimiques et/ou biologiques réalisés sur des dispositifs ayant subi des cycles répétés en conditions « pire-cas » ou bien en utilisation réelle.

3. Intégrer durée de vie et cycle de vie dans une stratégie globale de sécurité biologique

En intégrant la durée de vie d’un DM à l’évaluation biologique au cours de son cycle de vie, les fabricants s’alignent sur les exigences du MDR 2017/745 et des normes ISO 10993 pour garantir la sécurité biologique de leurs dispositifs à chaque étape de leur existence. L’évaluation de la durée de vie se concentre sur les impacts cumulés subis par les matériaux pendant l’utilisation clinique, tandis que l’analyse du cycle de vie élargit le champ d’étude aux risques liés aux matières premières, à la fabrication, au transport et au stockage. Ensemble, ces approches établissent un cadre de gestion des risques complet pour prioriser la sécurité des patients à toutes les phases.

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