La validation et
les méthodes Agiles
Dans tous les secteurs de l’économie, les solutions informatiques se diversifient et évoluent rapidement. Les fabricants de médicaments et de dispositifs médicaux recherchent eux aussi la rapidité et la flexibilité. Pour le développement ou la configuration de leurs systèmes les industriels ont le choix entre le modèle historique, dit cycle en V, ou l’approche Agile. Une fois opérationnel, le système doit fonctionner de manière fiable et reproductible conformément aux exigences réglementaires et ce quelque que soit son cycle de développement. Comment valider et maintenir dans un état validé un système dont le cycle de développement suit une méthode agile ?
Conformité réglementaire : agilité et cycle en V
La réglementation sur les dispositifs médicaux et les produits pharmaceutiques sont applicables indépendamment du cycle de développement logiciel
L’approche agile
Les méthodes agiles sont itératives, c’est à dire qu’elles comprennent des cycles de développement successifs. Chaque itération se base sur des éléments essentiels comme les exigences utilisateurs et les critères d’acceptation qui vont permettre de démarrer le cycle de développement. A la fin de chaque itération, on obtient une version ou incrément en vocabulaire agile, qui est censé être un produit utilisable par les utilisateurs…. Le principe est de livrer des versions fiables du système même si toutes les fonctions ne sont pas finalisées.
À la différence de ce qui est demandé dans le modèle en V, cette approche permet de démarrer les développements sans la rédaction de spécifications fonctionnelles détaillées préalables, car les utilisateurs et l’assurance qualité sont impliqués dès le début et valident en continu la réponse fonctionnelle.
L’approche agile est bien adaptée quand toutes les exigences du système ne peuvent pas être décrites avec précision au début du projet. Historiquement, les projets web ont été parmi les premiers à l’utiliser, pour l’ajout d’un chatbot GxP par exemple. Le point essentiel est que les utilisateurs disposent des fonctions au fur et à mesure des mises à jour en production et peuvent modifier les exigences tout au long du cycle de vie du système.
La désignation de méthode agile recouvre différentes approches alignées avec le Manifeste Agile de 2001. On peut en citer quelques-unes : Scrum, eXtreme Programming (XP), Feature Driven Development (FDD), Rapid Application Development (RAD), Behavior Driven Development (BDD) …
On peut noter que l’approche Agile a été mise en place principalement pour les étapes de développement logiciel et que selon les méthodes, certaines démarrent dès les phases de pré projet et faisabilité, d’autres sont plus orientées sur l’exécution du projet. Ce sont ces dernières qui sont essentiellement utilisées en environnement réglementées. (exemple la méthode Scrum).
Le cycle en V
Le modèle en V est une variante du modèle Waterfall de développement logiciel. Il désigne une procédure séquentielle dans laquelle chaque étape doit être finie pour que la suivante puisse commencer. La branche descendante correspond aux phases de conception. La branche montante correspond aux phases de test. Chaque étape de conception correspond à une phase de vérification.
Cette méthode nécessite une définition précise des exigences dès le départ. Elle est bien adaptée aux systèmes pour lesquels les changements en cours de développement sont limités. Le planning initial et le périmètre fonctionnel ne sont pas censés changer au cours du projet. La traçabilité entre les exigences et les tests assure un contrôle documenté de la qualité à chaque étape.
Que dit la réglementation ?
Pour le secteur pharmaceutique, il n’y pas d’incompatibilité entre les principes de la validation et ceux de l’approche agile. On peut s’appuyer sur le Guide GAMP® 5* seconde version de 2022 qui reprend les exigences et qui ne préconise pas un cycle de développement précis mais décrit une succession de cinq phases ; planification, spécification, configuration (ou codage), vérification et rapport. Il est essentiel que la gestion des risques soit intégrée dans toutes les étapes, ce qui implique une analyse de risque dynamique. De même la réglementation sur les dispositifs médicaux (Règlement (UE) 2017/745 et Règlement (UE) 2017/746) n’impose aucune séquence précise pour les projets de conception et développement logiciel.
A noter que la méthode utilisée n’a aucun impact sur le contenu des preuves documentées exigées, qui doivent être conformes aux attendus des normes.
L’approche agile peut donc être mise en œuvre dans un environnement GxP* pour autant qu’elle intègre les exigences réglementaires sur la documentation du logiciel et le système de management de la qualité. En particulier, il est essentiel de conserver la maîtrise de la traçabilité des exigences tout au long du développement.
Quand et Comment valider avec l’approche agile ?
Lors d’un développement agile, les phases du GAMP 5 sont menées dans une itération, chacune d’entre elles aboutissant à un incrément f du système, qui correspond à une première version de l’application utilisable. Au cours de chaque cycle, cet incrément est validé pour garantir qu’il répond aux exigences des utilisateurs et aux spécifications de conception.
La validation doit permettre de montrer que le cycle de vie est maîtrisé, elle nécessite les mêmes livrables que pour les systèmes GxP développés par le mode en V.
Il faut noter que l’organisation du processus de validation est différente dans le monde agile, car l’équipe projet est pluridisciplinaire, composée d’un développeur, d’un utilisateur et d’un valideur à minima qui doivent travailler en même temps et non de façon séquentielle. De plus, l’utilisation d’outils est indispensable pour réussir la conduite en mode Agile.
Dans les secteurs réglementés, les projets sont fréquemment de type hybrides. C’est-à-dire une partie itérative en agile, où on retrouve les UAT, les vérifications d’installation, fonctionnelles et migration de données, suivi d’une dernière phase de validation sur le produit final pour mise en production, avec la réalisation de la qualification de performance.

Par exemple, un logiciel embarqué peut être développé en mode agile et être validé suivant un modèle en V avant la livraison finale
L’organisation
Dans la pratique agile, la validation est une composante intégrale du développement et non une réflexion après coup. L’approche agile est avant tout un état d’esprit qui met l’accent sur la collaboration, la transparence et la communication, et cela s’applique également à la validation. Le responsable de la validation fait partie intégrante de l’équipe, il doit être formé aux principes et pratiques du mode agile.
Citons ici un cas particulier. Quand une entreprise choisit le mode Software as a Service pour une application, il arrive que l’hébergeur mette à jour le logiciel à un rythme rapide car il développe en agile. Le client est prévenu de la montée de version par notification et doit concevoir sa stratégie de validation en fonction du risque induit pour ne pas tout revalider.
Les outils
Dans un secteur réglementé, il est aujourd’hui déconseillé aux équipes de se lancer sans outils spécifiques.
Par exemple, des applications de type ALM (Application Lifecycle Management) doivent permettre d’automatiser le suivi des exigences qui peuvent évoluer mais aussi d’intégrer la notion de risques et la traçabilité des tests associés.
D’autres applications serviront à livrer les nouvelles versions, à gérer les configurations. Enfin, il existe des outils d’automatisation de tests, qui permettent par exemple de programmer l’exécution automatique des tests de régression. La traçabilité de ces tests automatisés doit également inclure une intégration complète avec les exigences des utilisateurs et les risques associés.
Les tests
Dans le mode agile, des activités de validation sont réalisées à chaque itération et sont une partie intégrante du processus de développement. Chaque version doit être vérifiée et l’effort de test doit être ciblé avec soin. La stratégie inclura par exemple des tests de non-régression pour gérer le risque de modification d’une fonction déjà testée.
Différents types de tests doivent être réalisés, non seulement pour démontrer le fonctionnement (tests nominaux) mais aussi des tests aux limites et de défaillance.
La documentation
La documentation de validation est un point essentiel. Elle doit être intégrée au cycle de développement et mise à jour au cours des itérations.
L’approche du mode agile est de dire que la documentation doit être au format électronique. Ceci pour faciliter les mises à jour dynamiques des exigences, des risques et des tests. Chaque version applicative livrée doit être liée aux enregistrements de spécifications à jour.
Ainsi la traçabilité de chaque modification est garantie. Il est à noter que selon les outils utilisés, il n’y a pas à proprement parlé de signature électronique documentaire.
Le système de management de la qualité
Les méthodes de développement agiles doivent être prévues par le système de management de la qualité (SMQ) de l’entreprise qui les met en œuvre.
Une procédure doit définir comment la validation s’intègre dans le processus de développement Agile avec prise en compte des outils utilisés et la définition des rôles et responsabilités. Le rôle du responsable de validation et de l’assurance qualité dans les équipes doit être clarifié et défini dès les premières étapes de la planification.
Les facteurs clés de succès
L’agilité n’est pas, comme il est dit parfois, une approche sans aucune formalisation ni maitrise des changements ; il est possible de l’utiliser dans un contexte réglementé.
Un des facteurs clés de succès est l’implication de l’Assurance Qualité dans le projet, et ce, dès le début, à savoir l’expression des besoins utilisateurs.
Au cœur de l’approche agile, se trouve une équipe autonome, pluridisciplinaire et stable. Par stable, on entend une même équipe qui suit le projet de bout en bout. Et du personnel formé à la méthodologie agile, formation tant sur le vocabulaire qui est parfois spécifique en fonction de la méthode appliquée ; qu’une formation à la méthodologie de travail qui est associe collaboration et flexibilité.
Pour une validation efficace, des outils spécifiques au monde agile sont indispensables. Ils vont assurer le suivi des exigences et des risques tout au long du développement.
Sa mise en pratique, demande une transformation de l’organisation et des pratiques de la plupart des industriels de la santé. Aussi, le mode hybride peut être une approche de transition vers le mode full Agile.
Retour d’expérience sur la validation dans un projet Agile
Les retours positifs sont l’obtention d’un système qui répond aux attentes des utilisateurs, grâce à la flexibilité offerte par la méthode.
La prise en main progressive par les utilisateurs clés génère une adhésion et une acceptance du nouveau système, particulièrement intéressante.
Un point de vigilance : le travail en mode agile ne fait pas gagner de temps contrairement aux idées reçues. La répartition temporelle est différente. Ne perdons pas de vue, qu’en mode agile, les mises à jour de documentation de spécifications, les mises à jour d’analyse risques, les répétitions de tests, sont aussi nombreuses que la quantité d’itérations nécessaires pour obtenir un produit fini. Aujourd’hui, pour gagner du temps, ces mises à jour ne sont pas correctement réalisées sur les projets et posent des problèmes de compliance.
Autre point de vigilance : La qualité des tests réalisés. Les tests sont trop souvent linéaires, ils vérifient seulement le fonctionnement système et ne s’appuient pas réellement sur les risques identifiés. Les tests aux limites ou en défaillance ne sont pas suffisamment présents.
Enfin, l’agilité a ses limites. La flexibilité et les capacités d’ajustement ne doivent pas aboutir à un système radicalement différent de l’expression de besoin initiale. Ne serait ce que pour des raisons de faisabilité en termes de couts, ressources, délais et qualité.
EFOR à vos côtés en mode Agile
Les experts VSI d’EFOR réalisent les activités de validation de vos systèmes informatisés en toute indépendance dans les projets agiles et séquentiels. Nous appliquons une méthodologie adaptée au contexte en intégrant les analyses de risques et la production de documentation, adaptée aux dernières évolutions réglementaires et technologiques. Cette démarche éprouvée mise en œuvre par nos d’experts démontre la conformité de vos systèmes informatisés.
EFOR vous accompagne sur :
- Participation à la conception du système
- Réalise des analyses de risques itératives
- Rédige des tests formalisés pendant les cycles ou itérations
- Réalise des formations à la validation en mode Agile en environnement GxP
- Assistance à l’exécution des tests lors des itérations en utilisant les outils nécessaires et édition du rapport de validation